Conséquences économiques de l’accord-cadre avec l’UE

Un non à l’accord-cadre serait-il source d’inflation ?

Ces derniers mois, l’inflation en Suisse a connu une chute aussi prononcée que surprenante, due principalement au prix du pétrole.

Evolution de l’inflation (en %, contributions en points de pourcentage)

À l’heure actuelle, aucun indice de reprise prochaine de l’inflation n’est observé. La stabilité des prix est donc garantie, et la Banque nationale suisse n’a aucune raison de modifier sa politique monétaire. Si elle relevait les taux avant la Banque centrale européenne, cela réduirait le différentiel de taux par rapport à notre principal partenaire commercial, stimulerait le franc suisse et tasserait inutilement la conjoncture et l’inflation. Une intervention anticipée de la BNS n’est concevable que si les attentes d’inflation en Suisse augmentaient notablement. Or, une inflation accrue n’est pas en vue malgré le plein emploi et une situation économique solide. Comme la spirale des prix et des salaires ne tourne que très lentement, la hausse indirecte de l’inflation ne peut être provoquée que par une modification structurelle des conditions-cadres, par ex. un renforcement des obstacles au commerce. L’échec de l’accord-cadre institutionnel (ACI) avec l’UE, qui fait actuellement l’objet d’intenses débats, génèrerait-il un tel potentiel inflationniste ?

Grandes lignes de l’accord-cadre

Le champ d’application de l’ACI inclut les accords existants portant sur la libre circulation des personnes, la suppression des obstacles techniques au commerce, le transport terrestre, le transport aérien, l’agriculture ainsi que tous les accords futurs. La Suisse s’engagerait en principe à reprendre de manière dynamique les règles juridiques correspondantes, mais aurait le droit de participer à l’évolution ultérieure du droit de l’UE. L’adaptation du droit suisse se ferait selon la méthode de la démocratie directe. Si un droit était refusé par référendum populaire, l’UE pourrait prendre des mesures de rétorsion dans le cadre de la proportionnalité.

Conséquences économiques d’un rejet

Si l’accord-cadre était refusé, l’équivalence de la réglementation boursière suisse disparaîtrait à la mi-2019. Dans le même temps, l’ordonnance suisse concernant la reconnaissance de plateformes étrangères entrerait en vigueur, ce qui atténuerait sensiblement l’effet négatif sur l’économie suisse. Les exportations de marchandises montrent bien à quel point l’UE est un partenaire commercial important. En 2018, 52% d’entre elles ont été à destination de l’UE.

Exportations de marchandises suisses par groupes de pays

Le perfectionnement de l’accord sur la suppression des obstacles techniques au commerce (ARM) serait également dans l’impasse. Si l’UE durcissait ses règles de normalisation, toutes les entreprises exportant vers l’UE devraient appliquer ce règlement. Tant que le Parlement suisse garantit la mise en œuvre autonome de ces réglementations, les coûts directs pour l’économie devraient rester limités. En fin de compte, 92% des exportations de marchandises suisses sont dues à des entreprises appartenant à un groupe familiarisé avec les règles de l’UE. Or, un  » Swiss Finish  » nécessiterait des agréments différents pour la Suisse et pour l’UE, ce qui pousserait à la hausse les coûts des produits. Par ailleurs, d’autres problèmes apparaîtraient pour l’accord sur l’électricité, encore en suspens, la participation aux programmes de recherche de l’UE ou le droit de cabotage dans le transport aérien. Sur le plan économique, un rejet de l’ACI n’aurait pas de conséquences négatives sensibles immédiatement. Mais celles-ci se manifesteraient de façon insidieuse. Avec une approbation sans Swiss Finish particulier, les incidences négatives ne seraient sans doute pas mesurables. En fin de compte, la question de savoir si les conséquences économiques négatives l’emportent sur les pertes de souveraineté politique est une question de nature politique.

Effet sur les marchés des actions et des obligations

Avec davantage d’obstacles techniques au commerce, certaines entreprises suisses perdraient de leur compétitivité, avec un effet négatif sur le cours des actions. En outre, les obstacles au commerce poussent typiquement l’inflation à la hausse. Alors que le niveau structurellement faible des taux suisses baisserait en cas de non à l’ACI, l’absence de nouveaux accords freinerait la croissance du commerce extérieur et neutraliserait l’effet de l’inflation. Si le franc suisse conservait sa fonction de havre de sécurité, le niveau des taux en Suisse ne serait pas sensiblement touché par cette décision politique.

Manuel Ferreira, économiste en chef et stratège en chef de la Zürcher Kantonalbank

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